Vous êtes passionné de musique traditionnelle cubaine ? Alors, vous saurez qu’aux racines de la salsa cubaine se trouve le son de l’est du pays (le « son oriental »). Et que, dans les gênes du son et du changüí guantanamero, se trouvent le nengón et le kiribá de Baracoa.

Seulement une visite à Baracoa vous permettra de venir rencontrer les gens qui cultivent le nengón et le kiribá au quotidien. Dans la communauté rurale d’El Güirito, vous pourrez vivre de première main ces rythmes ancestraux et y prendre plaisir.

El Güirito, une petite communauté aux traditions uniques

Vous arriverez au petit village d’El Güirito après 17 km de route partant de Baracoa. Ce voyage peut se faire en voiture ou à vélo. Sur votre chemin, vous profiterez de belles vues panoramiques propres de la Cuba rurale : de vertes vallées, des fermes paysannes, des palmiers, des cocotiers et d’autres arbres à fruits…

El Güirito est souvent associé à la culture du cacao. Mais cet endroit est aussi porteur de traditions culinaires remontant au peuple taïno et qui, au fil de l’histoire, sont devenues métissées. Ici, on peut goûter à des délices tel le bacán, une sorte de tamal fait de plantains, de lait de coco, d’achiote et d’autres épices et farci à la chaire de crabe ou de porc.

La tradition du nengón et du kiribá était déjà présente dans la région à l’époque de la lutte pour l’indépendance de Cuba, à la deuxième moitié du 19^ème siècle. Les mambises (combattants de l’armée de libération) dansaient ces rythmes lorsque la guerre leur permettait de tenir une célébration ou une fête.

À la rescousse du nengón et du kiribá

La région de Baracoa et l’ensemble de l’extrémité est de la province de Guantánamo comportent une fusion d’influences indigènes, africaines et européennes. Un éventail de rythmes a vu le jour ici, entre les montagnes et la mer, au fil des siècles.

Le nengón et le kiribá sont des expressions musicales et de dance enracinées dans les fêtes paysannes traditionnelles de Baracoa. Face à l’arrivée de formes musicales modernes et à l’exode des jeunes vers les centres urbains, les habitants d’El Güirito se donnent comme mission de cultiver, de transmettre et de faire perdurer leurs traditions.

Tereza Roché, la directrice du groupe du nengón et du kiribá d’El Güirito, est un trésor culturel vivant de Baracoa. Avec le soutien des institutions culturelles cubaines, Tereza et les membres du groupe préservent cet héritage musical, assurant en même temps la relève en travaillant auprès des enfants et des jeunes : les « kiribasitos » (les « petits kiribás »).

Une fête paysanne à El Güirito

Les fêtes paysannes sont préparées depuis tôt le matin. La communauté d’El Güiritio reçoit de temps en temps des invités cubains ou étrangers et on s’apprête tôt pour offrir un porc rôti à la manière traditionnelle de la campagne. Le cochon prend quelques 4 heures pour être à point, rôtissant lentement, ce qui requiert de patience et de dévouement. Ce n’est pas tout le monde qui sait comment le faire correctement…

Les familles locales apportent chacune un plat traditionnel. Au cours du matin, elles arrivent, souriantes et joyeuses, avec un éventail de délices pour le grand plaisir des convives.

Les musiciens aussi arrivent l’un après l’autre et se mettent à jouer des instruments typiques du nengón et du kiribá : le guayo, les maracas, la marímbula, le bongó et le tres. Petit à petit, on commence à écouter ces formes anciennes et séminales de la constellation musical du son oriental cubain.

Bienvenue à la fête du nengón et du kiribá

Après quelques mots chaleureux de bienvenue de la part de Tereza, les musiciens enclenchent la fête avec un nengón classique, où les voix interagissent suivant un format de soliste-versus-chœur : « Pero báilalo / para ti, nengón ! / Pero gózalo / para ti, nengón ! »

Les couples se déplacent d’une douce cadence décrivant un cercle, les femmes suggérant de leurs pas le mouvement des pieds lorsqu’ils déplacent les fèves de cacao sur le plancher.

Tant le nengón que le kiribá comportent des paroles bucoliques en vers. Prenez comme exemple ce kiriba, qui alterne également la voix du soliste et celles du chœur : « Kiribá, kiriba ! / Je m’en vais vers les montagnes. / Kiribá, kiriba ! / Et je ne suis pas du tout pressé. / Kiribá, kiriba ! / Je te donne mon sourire en cadeau. / Kiribá, kiriba ! / Car tu ne peux pas me tromper. »

Très bientôt, les danseurs invitent les visiteurs à se joindre au bal et ainsi la fête se poursuit, portée par la joie des locaux comme des voyageurs.

Les plats typiques de la région et l’héritage taïno

Certes, vous pouvez essayer les plats typiques de la région dans la ville de Baracoa et aux environs, mais au siège du nengón et du kiribá vous dégusterez une variété et une authenticité qu’on ne trouve pas dans les restaurants fréquentés par les voyageurs.

La préparation de ces plats repose sur des ingrédients telle l’huile et le lait de coco, ainsi que l’achiote et d’autres épices qui assaisonnent des légumes variés, tout comme du poisson et du crabe. Ici, vous pouvez aussi savourer le chorote, une boisson traditionnelle à base de cacao, de lait de coco et de farine de plantain.

L’avenir : Patrimoine culturel mondial intangible ?

Au fil des ans, le groupe du nengón et du kiribá d’El Güirito a été récipiendaire de nombreux prix. On lui a octroyé le Premio Memoria Viva (Mémoire vivante) de l’Institut Cubain de Recherche Culturelle Juan Marinello et le Premio Nacional de Cultura Comunitaria (Prix National de Culture Communautaire).

Tereza Roché raconte aux visiteurs que le groupe d’El Güirito et les autorités culturelles cubaines sont en train de travailler auprès de l’UNESCO pour faire en sorte que le nengón et le kiribá soient reconnus comme des éléments du patrimoine mondial culturel intangible. Nous espérons que cette reconnaissance bien méritée arrivera bientôt à cette communauté unique et sa merveilleuse culture vivante.

Information pratique et renseignements pour votre budget

• Les performances au siège du nengón et du kiribá sont de deux types. D’une part, elles peuvent avoir lieu dans le cadre d’un échange culturel organisé ou d’une visite de groupe organisée. D’autre part, chaque samedi, le groupe offre un espace en permanence : une performance ouverte aux visiteurs qui arrivent sans préavis.
• Les espaces en permanence des samedis commencent d’habitude à 15h00, mais il est toujours bon de vérifier l’horaire le matin ou la veille, au cas où il y aurait une modification.
• Les échanges culturels ou visites de groupe organisées doivent être coordonnées directement auprès de la directrice du groupe, Tereza Roché.
• La forme de ces deux types d’événements diffère aussi. Les espaces offerts en permanence les samedis durent généralement deux heures et ils comprennent de la musique, de la danse et l’invitation aux visiteurs à se joindre aux danseurs. Pour leur part, les échanges culturels ou visites de groupe organisées prennent la forme d’une fête paysanne, qui commence tôt l’après-midi et se prolonge pendant plusieurs heures. La fête paysanne comprend les plats traditionnels, mais aussi un parc rôti à la manière paysanne traditionnelle.
• Vous pouvez vous rendre à El Güirito de plusieurs manières. Un taxi pour la journée coûte entre 25 et 30 CUC, selon les différentes activités ou sites à visiter au cours de l’excursion. La visite au siège du nengón et du kiribá peut être combinée avec une visite à la Ferme de cacao Las Mujeres, ou au site archéologique Cueva del Cacique, ou avec la plage Cajuajo, ou la plage El Manglito ou le Canyon de Yumuri.
• Vous pouvez aussi vous rendre au siège du nengón et du kiribá en bicyclette. El Güirito est situé à quelque 17 km de Baracoa, un trajet qui se fait pour la plupart sur une route asphaltée, les derniers 500 mètres étant sur un chemin rural de terre rouge. La location d’un bon vélo à Baracoa coûte 6 CUC pour la journée. Villa Paradiso offre à ses visiteurs, à titre de gracieuseté de la maison, des cartes cyclables vous permettant de faire cette excursion (et d’autres). Nous vous invitons à en apprendre davantage sur le cyclotourisme et sur le tourisme durable dans la région de Baracoa.